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“Les marques d’alcool ont hâte de retrouver les barmen sur le terrain pour relancer la convivialité française ensemble”

4 min de lecture
Julien Pinard-Legry et Yoan Bonneau

Depuis mars 2020, l’activité des cafés-hôtels-restaurants (CHR) alterne entre fermetures et fonctionnement ralenti. Les salons ont été réduits à peau de chagrin. Les occasions de rencontrer directement les consommateurs aussi. Une situation qui a bouleversé la façon de communiquer des alcooliers ainsi que des distributeurs. Issus d’un riche parcours dans le bar puis en tant que brand ambassadors durant huit ans pour Diageo, le leader mondial des spiritueux, Yoan Bonneau et Julien Pinard-Legry animent une cellule dédiée à la stratégie marketing et au développement des marques à l’agence PWP (animations pour les marques en CHR, représentation des marques, forces de vente externalisées). Leur expertise de spirits marketing strategy consultants permet de décrypter cette période inédite.

Depuis le premier confinement, comment avez-vous adapté l’accompagnement des marques ?

Yoan Bonneau – Les marques ont mis en stand-by beaucoup de projets, d’activation et de tournées par exemple. Certains brand ambassadors sont en activité partielle, d’autres se concentrent sur des secteurs d’activité différents comme les cavistes (indépendants, en franchises ou en chaînes) ou le digital. Dès qu’il sera de nouveau possible d’aller dans les bars, les brand ambassadors retourneront à la rencontre des barmen. C’est le meilleur des soutiens.

Julien Pinard-Legry – En mars 2020, la première réaction a été de tout stopper, comme l’était le pays, avant de s’adapter. Les budgets ont pu être pour la plupart gelés, et non supprimés. Dans un deuxième temps, les entreprises ont commencé à chercher des solutions pour garder le lien avec leurs clients (CHR et caves), et continuer à communiquer. Il y a eu une vraie volonté de trouver des idées pour soutenir le CHR, dans un contexte inédit. Il ne fallait pas que cela soit perçu comme de la récupération, ce qui limite le champ d’action des maisons. On sait que les distributeurs-grossistes CHR souffrent énormément de la situation, alors que d’autres entreprises ont pu s’appuyer sur la poursuite des activités de la grande distribution.

Quelles sont les spécificités du réseau cafés-hôtels-restaurants ?

Yoan Bonneau – Nous avons eu des réflexions avec certaines maisons pour trouver des projets de soutien qui soient cohérents, dans un vrai esprit du maintien du CHR. Pour les marques, le CHR est un terrain d’expression. Ce vecteur permet aux maisons de faire connaître leur portefeuille aux consommateurs. Le fait d’avoir des prescripteurs et des professionnels qui valident la qualité des produits est très important pour eux.

Julien Pinard-Legry – En CHR, les marques ne sont pas toutes les mêmes qu’en grande distribution. Un lancement de produit haut de gamme se fait dans un premier temps en CHR, puis en grande distribution une fois que le consommateur connaît la marque. Certaines marques ne souhaitent pas être distribuées en grande distribution, tandis que les cavistes recherchent des références exclusives. Bien sûr, le gros des volumes confondus du portefeuille se fait en grande distribution.

De votre point de vue, comment s’est déroulée la réouverture des bars à l’été dernier ?

Yoan Bonneau – Les marques sont restées assez timides et attendaient de voir l’évolution de la situation sanitaire. Les autorisations de terrasses ont été mises en place par plusieurs villes et certaines maisons de distribution ont essayé d’aider au mieux la profession. Certaines marques ont réadapté leurs tournées, notamment en réorientant vers les bars des activations qui étaient prévues dans les discothèques. Les secteurs qui ont été le moins timides sont ceux du vin et de la bière. Une marque de vin peut s’ouvrir à plusieurs concepts de bars, pour toucher des consommateurs dans un contexte plus festif.

Julien Pinard-Legry – Il faut rappeler que les restrictions applicables dans les bars étaient draconiennes (pas de comptoir, pas de clients debout…) Les mesures sanitaires ont contraint l’exercice – avec la crainte, pour les marques, d’être pointées du doigt s’il devait y avoir un écart. L’agence PWP a imaginé le certificat PWP Secure, un protocole de formation qui permet de gérer une animation sur le terrain en respectant toutes les recommandations sanitaires en vigueur. L’idée est de conforter les entreprises à continuer d’interagir avec le CHR quand la période le permet.

“Les aides ont le mérite d’exister, mais la trésorerie des bars n’est pas extensible”

De quelle manière observez-vous la nouvelle fermeture des bars débutée en octobre ?

Julien Pinard-Legry – Les propriétaires et managers d’établissements cherchent tous des solutions. On sait pertinemment que le click & collect ne compense pas les pertes. Il convient de rappeler que la France fait partie des pays qui ont la chance d’avoir des soutiens de la part du gouvernement, mais malheureusement ces aides ne viennent pas combler les pertes de certains établissements. Bien que ces aides aient le mérite d’exister, la trésorerie des bars ne permet pas d’éponger une telle crise sanitaire.

Yoan Bonneau – Le cocktail à emporter n’a jamais permis de combler le manque de chiffre d’affaires. C’est aussi un maintien d’une certaine communication, pour garder le lien avec ses clients

Julien Pinard-Legry – C’est important d’avoir un lien avec l’extérieur, mais cela engendre des coûts supplémentaires en termes de personnel. Beaucoup ont fait le choix de fermer totalement et d’attendre. Le cocktail, qui a une notion de partage et de convivialité, s’emporte moins facilement qu’une offre food.

Dans ce contexte, quelles pistes de communication s’ouvrent aux marques ?

Julien Pinard-Legry – Beaucoup de marques se préparent à l’après-crise. Dans le cadre de l’externalisation, la période nous offre le temps de recruter, former et accompagner au mieux les nouveaux ambassadeurs vers la perspective d’une réouverture prochaine. C’est la solution pour avoir une présence humaine à la réouverture. Des lancements de produits et des activations restent dans les tuyaux. Par ailleurs, les annonces sur l’évolution des moyens de lutter contre la Covid peuvent rassurer les marchés. Pour la plupart d’entre elles, les marques espèrent revenir sur le terrain au printemps, et se donnent les moyens de créer des postes. Nous avons aussi été sollicités sur des systèmes de soutien au CHR. Notre fin d’année 2020 a été assez chargée !

Photo: © Philippe Martineau

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A propos de l'auteur
Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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