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Les inquiétudes des investisseurs entretiennent la déprime des marchés

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Au plus bas depuis six ans, la Bourse de Paris peine à remonter. Les perspectives macroéconomiques n’incitent guère à l’optimisme. Les variables financières restent importantes, la consommation n’étant pas le seul paramètre pris en compte sur les marchés.

« La lourdeur du marché, incapable de tenir un rebond, même minime, est déprimante », confie à l’AFP Guillaume Garabédian, gérant chez Meeschaert Gestion Privée. Les quelques séances de hausses survenues ces dernières semaines à la Bourse de Paris ne parviennent pas à véritablement s’enchaîner, comme si une chappe de plomb empêchait un véritable rebond du CAC 40. Depuis juin 2007, point déclencheur de la crise, l’indice parisien a perdu 55 % de sa valeur. La semaine dernière, il était même au plus bas depuis avril 2003. Les interrogations se succèdent sur la persistance de la crise. La contagion de la crise à l’économie réelle fait figure d’explication toute trouvée : alors que les valeurs financières suscitaient initialement l’inquiétude, c’est aujourd’hui tout le système de consommation et de production qui semble affecté. Mais ce n’est pas le seul paramètre incriminé dans cette déprime généralisée des marchés.

L’action des gouvernements est particulièrement scrutée par les investisseurs. Car leurs décisions pourraient influer sur les carnets de commandes des mois à venir. En France, les efforts se sont notamment portés sur l’automobile, qui a fait l’objet de mesures exceptionnelles : en contrepartie d’aides massives, des obligations de localisation des activités sont à respecter. Séduisant sur le principe – des fonds pour les constructeurs, un soutien à l’emploi -, la mesure s’est pourtant heurtée aux réticences de la Commission européenne, qui a tardé à acter ce plan par crainte de résurgence des mesures protectionnistes. Cet épisode prouve l’étroitesse des marges de manœuvre actuelles. Le plan de relance, basé sur de nombreuses infrastructures, écarte des pans entiers de l’économie. Aux Etats-Unis, les plans de sauvetage successifs – programme de relance, aides en faveur des banques -, d’un montant total de  2.787 milliards de dollars, laissent sceptiques les spécialistes. « Pour un dollar de baisse d’impôt, la consommation pourrait ne progresser que de 50 à 60 cents », estiment des analystes d’Aurel BGC.

« Certains de nos concitoyens ont pu croire que les 26 milliards de notre plan de relance constituaient une annonce abstraite, qui ne les concernait pas. Aujourd’hui, nous entrons dans la réalité économique et sociale du pays », tentait de rassurer début février le Premier ministre François Fillon pour convaincre du bien-fondé des mesures prises par le gouvernement. Les très mauvais chiffres du chômage entretiennent le doute sur la capacité des entreprises à traverser la crise. En parallèle, de nouveaux comportements s’installent : les produits de milieu de gamme souffrent, les consommateurs préférant faire le grand écart entre les premiers prix, les marques de distributeurs et des produits à forte valeur ajoutée ou synonymes d’une qualité difficilement remplaçable. Aux Etats-Unis, selon un récent sondage, 50 % des électeurs estimaient que le plan de relance pouvait être à même… d’aggraver la situation !

Les variables financières restent toujours prépondérantes

La capacité de résistance des pays émergents est aussi de nature à limiter les perspectives de rebond. Le développement de nombreuses firmes dans ces Etats est mis à mal par la crise. Les autorités chinoises ont du débloquer l’équivalent de 750 milliards d’euros, environ 7 % du PIB, sur deux ans afin de contenir une crise sociale naissante. La situation financière est également examinée par les professionnels du secteur : « les exemples d’Etats en situation de défaut possible se multiplient à l’image de l’Ukraine, du Kasakhstan ou encore des pays baltes », indique à La Tribune Romain Boscher, de Groupama Asset Management.

Parallèlement à ces conséquences de la crise, des paramètres davantage financiers rentrent en ligne de compte. A commencer par les dividendes, qui intéressent les actionnaires au premier plan. BNP Paribas et Axa verseront de 65 à 70 % de moins que l’an dernier, tandis que chez le cimentier Lafarge, le dividende par action ne sera qu’à 2 euros, contre 3,80 euros initialement espérés. Même punition chez Saint-Gobain et PPR, qui a annoncé également vouloir se recentrer sur ses activités d’équipement de la personne. Des emplois seraient menacés à la Fnac et chez Conforama. Au-delà de cette « rémunération », les actionnaires se réorientent vers des placements moins mouvementés. Les capitaux échangés quotidiennement à la Bourse de Paris ont atteint 3,3 milliards d’euros en janvier, contre des échanges allant de 6,7 à 8,7 milliards il y a un an. Le dollar et l’or font office de valeurs refuges, en enregistrant de significatives hausses.

Seuls des signes concrets sur l’activité, la consommation et les perspectives financières des différents acteurs économiques devraient permettre aux investisseurs de reprendre confiance et de pousser à la hausse les marchés actions.

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A propos de l'auteur
Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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